ELYSIUM : voir la critique (ci-dessous)

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mercredi 14 août 2013

 

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«ELYSIUM» : LA CRITIQUE DE L’ECRAN FANTASTIQUE ELYSIUM Une épopée bien tournée mais très naïve *** Pour son meilleur, « Elysium » porte la marque du précédent film de Neill Blomkamp : une Terre (en tout cas la portion qu’on en voit) déliquescente, écrasée de poussière et de chaleur, véritable ghetto dont les habitants, soumis […]

«ELYSIUM» : LA CRITIQUE DE L’ECRAN FANTASTIQUE
ELYSIUM
Une épopée bien tournée mais très naïve

***
Pour son meilleur, « Elysium » porte la marque du précédent film de Neill Blomkamp : une Terre (en tout cas la portion qu’on en voit) déliquescente, écrasée de poussière et de chaleur, véritable ghetto dont les habitants, soumis à la surpopulation, la pollution, l’épuisement des ressources, se partagent entre gosses affamés, bandes de petits malfrats, ouvriers exploités. Les quartiers parcourus en longs travellings, mi-favellas, mi-cités broyées par la guerre, évoquent à la fois Lagos et Aleph. La police omniprésente est formée de robots colossaux, qui ressemblent aux visiteurs insectoïdes de « District 9 ». Quant à la classe dirigeante, elle surveille de loin, par écrans interposés, cette lie dont on se tient à l’écart, envoyant s’il le faut des navettes surarmées pour maintenir l’ordre à coups de missiles. Si le thème du Royaume des riches surplombant de haut celui des “pauvres” est familier à la SF, écrite comme filmée (et dont « Metropolis » fut le premier exemple), le fait de l’avoir situé dans une gigantesque station orbitale à l’accès strictement réglementé, Elysium, dont la forme circulaire rappelle celle de « 2001 », est plutôt novatrice. Impressionnant aussi son survol, qui nous montre une enfilade de riants quartiers résidentiels nichés dans une verdure trouée de piscines, mais encastrés dans l’étroite circonférence tubulaire de la station comme ils le seraient dans la jante d’une roue de vélo. On pourrait certes chipoter sur le fait qu’on ne sait rien de plus, au sujet de ce panorama-cliché, que ce qu’on nous en montre : comment ont été au départ choisis les résidents, quelle est leur structure sociale, de quoi vivent-ils ? Mystère. Mais ce n’est là qu’une des faiblesses (ou des incohérences) d’un métrage qui, aussi riche soit-il esthétiquement, et bien-pensant idéologiquement (l’apartheid hante manifestement Blomkamp), pêche gravement par nombre de points de son scénario. Passe encore que le héros, Max, ouvrier irradié qui n’a plus que cinq jours à vivre, veuille par tous les moyen gagner Elysium où n’importe quelle maladie est guérissable en quelques secondes ; mais adjoindre à cette volonté de dernière chance la petite fille leucémique d’une jeune femme qui fut son amie d’enfance perdue de vue mais qu’il retrouve précisément à ce moment-là, cela fait quand même beaucoup. Enfin, si l’on veut bien se rappeler les mots d’Hitchcock selon lesquels meilleur est le méchant, meilleur est le film, il faut avouer qu’ici, en vertu d’un manichéisme bien paresseux, les deux vilains en lice sont pareillement ratés, aussi bien une Jodie Foster glacifiée en Ministre de la défense d’Elysium, que son homme de main Kruger, brute épaisse à deux dimensions dont on se demande bien comment il peut mener à bien tous ses exploits – l’un comme l’autre, d’ailleurs, voyant bâclée leur sortie. Sans doute, après une œuvre aussi personnelle que District 9, Blomkamp, nanti d’un budget nettement plus confortable, s’est-il laissé glisser sur la pente du blockbuster tout public. Avec son sens visuel intact (cf. le crash de la navette qui trace son chemin de cendre au milieu des jolies maisons blanches de style colonial d’Elysium), avec de constantes trouvailles de détail (le port d’exosquelettes qui démultiplient les capacités physiques des combattants), mais affadi par un simplisme thématique qui rend au final la tentative insatisfaisante, même si elle reste très honorable.

Jean-Pierre Andrevon