Se revendiquant volontiers comme un homme libre, George Clayton Johnson au physique haut en couleur de Gandalf fièrement baba-cool fut un remarquable auteur de science-fiction et accessoirement un farouche défenseur de la légalisation de la marijuana aux Etats-Unis. Décédé d`un cancer le 22 décembre dernier à l`âge de 86 ans, il connut une enfance agitée dans le Wyoming après le divorce de ses parents entre un père ancien militaire accessoirement bootlegger et une mère alcoolique qui fut déchue de son droit de garde quand il atteint ses quatorze ans, lui valant un placement en orphelinat. Soldat durant la Deuxième Guerre mondiale, enchaînant les petits boulots à travers le pays avant de trouver sa voie dans l`écriture, George Clayton Johnson cultiva sa vie durant un goût prononcé pour l`indépendance, ne travaillant que ponctuellement pour Hollywood, au gré de son inspiration comme de rencontres déterminantes. Ainsi lui doit-on en 1960 le script de la première version de « Ocean Eleven » mettant en scène le Rat Pack (d`où son crédit au générique du remake et des deux séquelles qu`en signera Steven Soderbergh par la suite) même si son domaine de prédilection demeura clairement la science-fiction. Fréquentant un cercle californien d`émérites auteurs du genre tels que Richard Matheson, Ray Bradbury et Charles Beaumont, il apparaît aux côtés de ce dernier en 1962 comme figurant dans « The Intruder » de Roger Corman avec William Shatner, pour lequel il écrira quatre ans plus tard rien moins que «The Man Trap», le tout premier épisode de «Star Trek» diffusé en septembre 1966. Auteur d`un second épisode à la demande de Gene Rodenberry qui ne sera finalement jamais tourné, il aura plus de chance avec le «Twilight Zone» de Rod Serling qui fit appel à ses talents de conteur à sept reprises entre 1961 et 1963. Outre une contribution à Alfred Hitchcock présente en 1959 et plus tard à la série «Kung-fu», son principal titre de gloire c`est d`évidence la co-écriture avec William F. Nolan en 1967 du mythique « Logan`s Run » qui deviendra de ce côté-ci de l`Atlantique « L`Age de Cristal », adapté en 1976 pour le grand écran par Michael Anderson avant d`être décliné sous la forme d`une série télé éponyme avec Gregory Harrison en lieu et place de Michael York dans le rôle du rebelle à une autorité homicide exterminant tout individu âgé de plus de trente ans pour le soi-disant bien de l`espèce. Figure iconique de la contre-culture, poète et essayiste dont on ne s`étonnera pas qu`il ait publié une étude sur Lovecraft, Johnson dirigea longtemps un littéraire café Frankenstein sur la côte californienne où la liberté de pensée était de mise. Et dont l`esprit résume à lui seul le parcours atypique et sans concession d`un créateur emblématique de toute une époque révolue.
Sébastien Socias